Chilcapamba, jour 3

Réveil humide dans la petite chambre qui donne sur l’immensité du lac. L’air est frais, comme cristallin et révèle un décor encore plus irréel tant il est vierge. Petit-déjeuner de rois devant cette vue à laquelle on ne peut décemment pas soustraire son attention. Jus d’ananas maison dont la douceur sirupeuse nourrit tous les sens. Ce sont les reprises à la flûte de pan de chansons occidentales qui résonnent dans le réfectoire.

Départ en pick-up pour la communauté indienne de Chilcapamba. On retrouve Victor, 21 ans, une natte d’un noir de jai qui lui descend le long du dos, et un sourire vissé aux lèvres. Il nous fait traverser une nature qui passe par toutes les nuances d’humidité et de végétations. Sol parfois boueux, parfois sableux. On découvre les farouches alpagas qui gardent férocement leurs terres grignotées avec appétit. Plus loin, les eucalyptus embaument l’air de leur fraîcheur et ondulent au gré du vent dans une danse souple et perpétuelle. Arrivée chez Victor à l’arrière du pick-up familial, l’accueil est digne de celui fait à une délégation exceptionnelle. Le repas est un régal de fèves, maïs et tubercules inconnus. Soupe de quinoa dont les papilles se rappelleront longtemps.

On prend l’après-midi pour découvrir les alentours à VTT, la lumière est d’or et descend dès 15h, baignant tout ce qu’elle touche d’un contraste formidable. Cotacachi est étonnement plus urbanisée qu’on aurait pu le penser et se fait le lieu de villégiature de tout un tas de retraités américains qui arpentent ses trottoirs d’un pas rond. Café glacé à la terrasse d’un coffee shop branché puis retour à la casa, la montée dans les chemins de poussière est particulièrement rude. Mais notre effort se trouve néanmoins récompensé par l’accueil en fanfare de tous les animaux de la maison, cochons et cochons d’inde compris, et un autre repas de gala où les petites tortillas de purée de manioc chantent sous la langue. Le ciel se fait violet et colore le bois de la même nuance fluorescente. On part se coucher au bruit des rires des cousins de Victor et des pneus de voiture qui dévalent les graviers à toute vitesse. Dehors, les citronniers ploient sous le poids de leurs fruits.